Bouts de vie from Montmartre, Paris et ailleurs...
27 Février 2014
Attention, je préviens tout de suite, ce billet n'est absolument pas politique, il n'est argumenté que de manière tout à fait personnelle, et je laisse les professionnels des chiffres et des statistiques faire leur boulot. Il se trouve simplement que le statut d'intermittent du spectacle, je le connais bien, et dans mon cas, la situation actuelle ne pouvait que m'interpeller ; je m'explique. Après avoir été longtemps moi-même intermittente, je suis en train de basculer du côté obscur de la force, à savoir celui des entrepreneurs, et donc des patrons, et donc des "méchants" du MEDEF qui ont juré la peau des intermittents. Dans le genre Lulu le cul entre deux chaises, je me pose là. En même temps, ne généralisons pas, puisque même Laurence Parisot a défendu le statut, comme quoi les choses ne sont jamais aussi simples que ça... Mais disons que je suis suffisamment bien placée pour savoir qu'il s'agit d'un statut souvent décrié mais surtout très mal connu.
Alors non, les intemittents du spectacle ne sont pas des gros glandeurs qui se lèvent à pas d'heure, qui bossent une fois de temps en temps histoire de faire leurs 507 heures, qui pensent tous être des génies incompris parce qu'ils grattent trois notes de guitare, des acteurs milliardaires qui touchent des cachets mirobolants et qui pointent quand-même aux Assedics, non ! La réalité d'un intermittent est toute autre. Un intermittent, c'est un technicien qui court après les piges parce que des films avec du budget, il n'y en a plus tant que ça, c'est une coiffeuse qui ne bosse que trois jours pas mois quand il y a un tournage d'émission télé parce que maintenant on tourne jusqu'à sept ou huit émissions par jour, c'est un comédien qui va accepter un petit rôle dans une pièce d'auteur et qui donnera quelques représentations dans une salle de 50 places de temps en temps, etc... Loin de moi l'idée de vouloir faire pleurer dans les chaumières, mais je pourrais continuer la liste indéfiniment !
Il y a beaucoup d'intermittents qui le sont parce qu'ils n'ont tout simplement pas le choix ! Combien rêveraient de signer un CDI ou ne serait-ce qu'un CDD et pouvoir, par exemple, enfin prévoir des vacances en famille à moins de quinze jours du départ (ça sent le vécu), parce qu'"on ne sait jamais, si on m'appelle pour du boulot, ça ne se refuse pas" ! J'ai été intermittente du spectacle pendant presque vingt ans (ça nous rajeunit pas ma brave dame !), et ma situation était, je l'accorde, assez particulière, mais comment faire autrement ? Comment obliger une boîte de prod par exemple à m'embaucher de façon pérenne sachant qu'on m'a appelé pour une compétence particulière et que, si demain l'émission s'arrête, on ne pourra pas me faire travailler sur un autre projet ? Je suis bien consciente que des abus ont pu être commis de toutes parts, mais citez-moi un seul secteur d'activités où personne ne profite du système et je veux bien me rallier direct à la cause du MEDEF ; à mon avis ce n'est pas demain la veille...
Et si cette fois je me place du côté des employeurs (ce que je me souhaite d'être bientôt), comment pourrais-je envisager la moindre production sans ce régime si j'ai juste besoin d'un cadreur ou d'un monteur sur deux jours par exemple ? Avez-vous seulement idée du nombre de gens qui travaillent aujourd'hui uniquement parce que ce statut existe ?
Sans parler bien sûr de la création. Car oui, l'intermittence, pour certains, ça sert aussi à ça ; avoir le temps de développer des idées, des concepts, qui créeront peut-être demain de nouveaux emplois. Si encore une fois je ne prends que mon cas, et bien que n'étant pas véritablement une artiste (non je ne reparlerais pas de Sylvie Vartan), si je n'avais pas été intermittente, aurais-je seulement eu le temps d'avoir envie de faire autre chose, de me lancer dans une autre aventure ? Et puis attention, les allocations chômage d'un intermittent du spectacle durent au maximum huit mois ! Et je peux vous jurer que huit mois, ça passe très très vite... Autant vous dire que si je peux toujours prétendre à ce statut, il y a belle lurette que je ne touche plus un kopek des Assedics ! En plus, pour information, je connais peu d'intermittents qui lors de leurs périodes de chômage en profitent pour se la couler douce, pour la simple et bonne raison qu'ils sont occupés à... chercher du boulot !!! CQFD
Bien sûr ce n'est pas la panacée, et il y aurait certainement pas mal de choses à revoir dans ce système, mais de là à vouloir purement et simplement supprimer ce régime, c'est juste complètement con. C'est aussi stupide que d'affirmer que ceux qui exercent des professions libérales ont plus de temps libre que les chefs d'entreprise ; mon ami médecin a adoré la réflexion, lui qui, c'est bien connu, ne fout rien de ses journées (n'est-ce pas JL ?) !
Beaucoup de manifestations auront lieu aujourd'hui dans toute la France, alors je tenais à dire à ma manière que j'étais de tout coeur avec mes copains musiciens, comédiens, cadreurs, scriptes, ingés son, costumières, électros, backliners, assistants-réals, maquilleurs, coiffeurs, monteurs, truquistes, casteurs, chargés de prod, doublures lumières, figurants, steadycamers, machinistes, électros, perchistes, régisseurs, accessoiristes, illustrateurs, constructeurs, peintres, menuisiers, voix-off, bruiteurs, cascadeurs, danseurs, etc, etc, etc...
Lulu, pacsée, maman comblée, marâtre assumée et communicante digitale de proximité.
Lulu From Montmartre est mon blog personnel. Pour tout savoir sur Montmartre autrement, rendez-vous sur www.montmartre-addict.com.
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